Bonjour,
Voilà une question bien difficile pour des spéléologues qui ne sont pas des spécialistes de l'activité sismique. Elle est en plus posée par une classe qui semble avoir déjà bien creusé la question !
Oui, la région a une activité sismique, comme tout le Chili. Madre de Dios est sur le front du Pacifique et c'est donc une des terres les plus proches de la zone de subduction. Cependant la zone est pratiquement déserte, ce qui réduit à peu de chose les risques encourus donc également la veille des autorités et des scientifiques. Cela diminue aussi les possibilités d'observation directe de phénomènes transitoires.
Sur le terrain on rencontre effectivement, en plus des calcaires, des laves, des grès et des roches granitiques (le batholithe patagon), mais nous parcourons peu ces zones qui n'ont pas d'autre intérêt pour nous que de constituer les bassins versant alimentant des rivières qui se perdront ensuite sous terre en atteignant les roches calcaires.
Ces dernières sont très faillées, pour des raisons tectoniques qui sont évidemment liées (entre autres) à l'activité sismique et aux compressions induites par la proximité de la zone de subduction. Il existe des cassures majeures présentant parfois des rejets de plusieurs mètres. D'autres fissures dans les calcaires sont ouvertes et courent sur des centaines de mètres ou davantage, elles ont parfois permis la remontée d'autres roches partiellement métamorphisées, plus dures, et qui forment par conséquent dans le paysage une ligne en relief de plusieurs décimètres, parfois plusieurs mètres. Nous avons baptisé l'une d'elles "la Muraille de Chine". Certaines posent de vrais problèmes de franchissement.
Sous terre on rencontre partout dès qu'on atteint une salle d'un certain volume des éboulis, des blocs effondrés, mais ils ne sont pas forcément le signe d'une activité sismique : la simple rectification progressive des voûtes pour atteindre la forme d'équilibre en plein cintre peut l'expliquer. Dans les puits, la gélifraction et l'action des éléments explique aussi la chute de matériel rocheux qui, très souvent, les bouche complètement.
À l'extérieur, on constate aussi sur le bord des canaux que nous parcourons en Zodiac de grands effondrements de versant, qui s'étendent parfois sur plusieurs centaines de mètres de hauteur. Ils peuvent avoir une origine sismique. Ils ont généré à leur pied des éboulis dont le cône se prolonge parfois profondément sur le niveau de la mer, comme nous avons pu le vérifier lors des mesures bathymétriques que nous avons conduites.
Ces questions seraient mieux traitées par les géologues chiliens qui vont venir renforcer notre équipe en février, mais ils ne parlent pas le français...